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Revoquer le loi Coréenne sur la Sécurité Nationale: pour un agenda Afro-Asiatique des droits de l’homme

Revoquer le loi Coréenne sur la Sécurité Nationale: 
pour un agenda Afro-Asiatique des droits de l’homme
Notre contribution s’inscrit dans le cadre de nos échanges réguliers en France avec les camarades de Paris Forum et le réseau Bandung spirit. C’est dans ce cadre que nous participons au projet de publication du Professeur Jean-Jacques Sène (Chatham University, USA) sur le thème Towards an afro-asiatique renaissance.

Le mirage asiatique ?

Commençons par les perceptions collectives, l’idéologie commune. Pour nombre d’Africains, la Corée du Sud est un modèle. Dans l’esprit de la plupart des intellectuels africains, elle fait partie des Etats qui ont su se développer1), entendons par là qui ont su intégrer la mondialisation capitaliste.

L’ultra consumérisme des jeunes citadins Africains, reflet d’une dépolitisation aux lourdes conséquences, les conduit à admirer les marques sud-coréennes de voiture, de téléphone portable et/ou téléviseur à écran plats…
Si l’on remonte plus loin dans le passé, à l’ère de Bandung, l’on peut reconnaître, par exemple chez W.E.B du Bois ou R. Wright une certaine fascination pour les luttes ou cultures asiatiques en général.

L’un des apports les plus importants de Richard Wright réside dans les interviews de personnalités politiques indonésiennes progressistes telles que Sutan Sjahrir ou Mohamed Natsir.

Il perçoit à travers elles la tragédie de leaders tels que Nkrumah, Sékou Touré ou Nasser : visionnaires, ils sont néanmoins isolés et doivent néanmoins composer avec l’inertie de formations sociales multiséculaires ou multimillénaires, source de méfiance, d’où précisément une grande vigilance qui se concrétise par l’autoritarisme et les dérives des forces de sécurité2).

L’avantage des sociétés asiatiques résiderait dans une cohésion psychosociale plus forte : c’est peut-être sur la base de ce rêve d’une unité sociale et politique plus structurée que, dans l’adresse à Nkrumah qui conclut Black power, il écrit :
“ African life must be militarized (la vie africaine doit être militarisée) !

L’on omet généralement de préciser que Wright s’empresse d’ajouter qu’il ne s’agit pas pour lui de prôner le fascisme des dictatures militaires mais une “militarisation du quotidien, des vies sociales des gens ; (…) donner une forme, une organisation, une direction, une signification et un sens à ces vies“3). Wright soulève ainsi la question du mode de vie car pour lui le développement doit être endogène et non dépendant de l’extérieur : il le dit par exemple à propos du financement du barrage d’Akossombo sur le fleuve Volta. Il vise donc une discipline et une éthique sociales qui seraient les fondations les plus solides pour de jeunes nations nécessairement appelées à errer avant de trouver leur voie, un peu comme le Ghana qui a connu bien des secousses avant de se retrouver aujourd’hui dans un fragile équilibre4).

Déjà en tant qu’écrivain, dans son fameux roman Native son publié en 1940 (traduit en français sous le titre L’enfant du pays), Wright décrit avec un réalisme subversif les pensées du personnage principal, le jeune marginal Bigger :

He liked to hear of how Japan was conquering China ; of how Hitler was running the Jews to the ground, of how Mussolini was invading Spain. He was not concerned with whether these acts were right or wrong; they simply appealed to him as possible avenues of escape. He felt that some day there would be a black man who would whip the black people into a tight band and together they would act and end fear and shame5).

Ces inclinations fascisantes spontanées naissent chez Bigger d’une révolte contre l’ignorance et de la peur (fear) : une révolte à laquelle il faut donner une forme pour qu’elle s’organise et constitue une force d’airain contre les causes qui l’ont engendrée.

L’un des rares participants occidentaux à Bandung, Wright perçoit dans l’islam et la religion de manière générale ce patrimoine immatériel sous-jacent à l’initiative historique des nations asiatiques. Pour cet husserlien la religiosité constitue une quasi-intentionnalité spirituelle qui façonne le monde. La religion est la force de la société qu’il observe et il prédit ce qui arrive maintenant : que l’aveuglement de l’Occident face à ces cultures fondées sur la spiritualité provoquera un jour des regrets, lorsqu’il sera trop tard.

Richard Wright prit la parole, après Cheikh Anta Diop, à la fin du Premier Congrès des Artistes et Ecrivains noirs, organisé par Alioune Diop en 1956 à la Sorbonne. Son message fut un approfondissement des leçons tirées du voyage au Ghana et de Bandung, du panafricanisme et du panasiatisme : l’indépendance et la mobilisation pour une libération collective à la fois économique et mentale.

La loi sur la sécurité nationale ou l’envers du décor

Evidemment après quelques lectures, par exemple l’article de Eric susmentionné, ou le film que nous venons de voir, nous sommes édifiés sur le prix du sang que le peuple coréen a versé pour hisser cette nation au rang des « Dragons » asiatiques. Dès la première décennie après la Seconde guerre mondiale, au moins cent mille travailleurs et militants sont emprisonnés, torturés, assassinés.

L’instrument légal de cette violence extraordinaire est la fameuse loi sur la sécurité nationale (LSN). Elle est encore utilisée aujourd’hui pour étouffer la liberté d’expression et de manifestation garantie par la Constitution :

Article 21
1. All citizens shall enjoy freedom of speech and the press, and freedom of assembly and association.
2. Licensing or censorship of speech and the press, and licensing of assembly and association shall not be recognized.
Cela rappelle la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples qui affirme à l’article 6 :

Tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne, puis quelques articles plus loin (11, 12) :
Toute personne a le droit de se réunir librement avec d’autres. Ce droit s’exerce sous la seule réserve des restrictions nécessaires édictées par les lois et règlements, notamment dans l’intérêt de la sécurité nationale, de la sûreté d’autrui, de la santé, de la morale ou des droits et libertés des personnes.

Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays. Ce droit ne peut faire l’objet de restrictions que si celles-ci sont prévues par la loi, nécessaires pour protéger la sécurité nationale, l’ordre public, la santé ou la moralité publiques.

Au niveau international, il existe aux Nations Unies un Rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression : Franck La Rue (Guatemala). Son mandat a été étendu en mars 2008.
Dans ce contexte la LSN est un anachronisme qui doit être abolie. Cela ne serait que justice rendue au peuple coréen, et aux organisations démocratiques et syndicales au sein desquelles il a su, de manière héroïque, se mobiliser.

Pour une action afro-asiatique concertée

Pour le CIJK, une action commune doit être engagée auprès de différents interlocuteurs, sous la coordination de l’AIJD et de son président Me Roland Weyl.

D’abord saisir la Commission sud-coréenne des droits de l’Homme, ainsi que le Forum des droits de l’Homme de l’ASEAN à travers une communication co-signée par les organisations ici présentes en vue de l’abrogation pure et simple de la LSN.

Ensuite saisir le Rapporteur spécial au niveau des Nations unies.

Enfin organiser un Forum afro-asiatique des droits de l’Homme au sein duquel, dans le cadre d’un dialogue Sud-Sud ouvert aux alliés du Nord, nous pourrions élaborer notre propre discours sur les violations des droits de l’Homme dans et par nos Etats, y compris les violations commises par les services de sécurité et autres gardes présidentielles.
Le CIJK est prêt à réfléchir avec vous pour cette action nécessaire et urgente pour la protection intégrale des droits économiques et sociaux des peuples d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine.
Pour le CIJK
Lazare KI-ZERBO
Secrétaire exécutif
Paris, 19 juin 2012

1) Cf. les travaux de Jean-Christophe Boungou Bazika, notamment « L’État et la construction de l’économie nationale: une comparaison Afrique-Asie », CODESRIA, 2004, http://www.codesria.org/IMG/pdf/boungou.pdf; lire l’analyse plus complète de Eric Toussaint « Corée du Sud : le miracle démasqué », 24 mars 2006, http://www.cadtm.org/Coree-du-Sud-le-miracle-demasque

2) Black power, three books from exile: Black power, the Color curtain, and White man, listen! With an introduction by Cornel West, Harperennial, 2008, p. 527

3) Op.cit., p. 415 ; lire aussi Floyd W. Hayes, The Cultural Politics of Paul Robeson and Richard Wright
Theorizing the African Diaspora, consulté le 10 avril 2010 sur le site http://www.nathanielturner.com/culturalpoliticsofpaulrobeson%20andrichardwright.htm . Hayes mentionne les arguments de Manthia Diawara sur le sens civique de la militarisation envisagée par Wright.

4) “what has happened in the Gold coast is just the beginning, and there will be much marching to and fro“, ibid.

5) Native son, Harperperennial, 2005, p. 115

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